
Appel au 15 obligatoire avant d'accéder aux services d'urgence
Il n’existe pas de profil type parmi les femmes trans (homme > femme) désireuses de recourir à une chirurgie féminisante. Certaines consultent dès le début de leur transition, d’autres après avoir débuté un traitement hormonal ; certaines sont très jeunes, d’autres ont fondé une famille ; il y a aussi celles dont le projet doit encore mûrir, et celles dont la transition psychologique, hormonale et physique est très avancée.
Face à cette diversité d’attentes, les équipes du CHU s’adaptent pour proposer à ces patientes un parcours de soins qui saura répondre à l’ensemble de leurs besoins. Créée en 2021 par le Dr Lucas Freton, chirurgien urologue, une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) mensuelle dédiée à la prise en charge des chirurgies d’affirmation de genre rassemble tous les acteurs de ce parcours : chirurgiens, infirmières de parcours, endocrinologues, médecins de la fertilité et de la reproduction, sexologues, psychiatres et psychologues, infirmières spécialisées, coordinateurs de soins, médecins généralistes et spécialisés, représentants d’associations...
Durant l’été 2022, le Dr Lucas Freton s’est formé à la vaginoplastie1 robot-assistée aux côtés du Dr Lee C. Zhao à la New-York University. Quelques mois plus tard, le 16 janvier, il réalisait au CHU la première intervention selon cette technique aux côtés des docteurs Claire Richard et Benoît Peyronnet, du Docteur Berahou, anesthésiste, et sous l’œil de son confrère new-yorkais qui, par visio-conférence, observait cette première française.
L’utilisation du robot nous permet de travailler en double abord et de diviser par deux la durée d’intervention. Ainsi, pendant que l’un crée une cavite vaginale a l’aide du robot, l’autre intervient sur les organes génitaux extérieurs (lèvres, clitoris…) auprès de la patiente. Dr Claire Richard, chirurgienne urologue
Pour cette intervention, le Dr Freton a eu recours à un robot chirurgical conçu par la société Intuitive et acquis en 2018 par le CHU : le Da Vinci Xi. Si l’acte chirurgical demeure sensiblement le même avec ou sans robot, son utilisation permet en revanche à deux chirurgiens de travailler en même temps, permettant de réduire la durée de l’intervention.
Dans le cas d’une vaginoplastie par inversion pénienne comme c’est ici le cas, l’intervention comprend la création d'une cavité néovaginale, la clitoroplastie, la labiaplastie, la réduction des corps caverneux, l'orchidectomie et l'urétroplastie. On parle alors d’inversion car la peau du pénis est notamment utilisée pour créer la paroi vaginale tandis que ses terminaisons nerveuses serviront à créer un clitoris sensible. Pour ce faire, la chirurgie robot-assistée semble présenter non seulement l’avantage de réduire les complications (notamment les plaies rectales) mais également de créer une profondeur vaginale dont la vascularisation est optimisée.
A l’issue de l’opération, comme lors d’une vaginoplastie non assistée par robot, la patiente reste hospitalisée quelques jours, autant que nécessaire. Durant cette période, elle bénéficiera de l’accompagnement pluridisciplinaire du CHU qui lui enseignera, notamment, les soins qu’elle aura à réaliser une fois rentrée chez elle, de manière autonome ou avec l’aide d’un professionnel de santé. Des consultations de suivi qui s’espaceront au fil du temps sont ensuite programmées au cours des semaines et des mois suivant l’intervention.
Chez les femmes recourant à la seule chirurgie de féminisation du visage, l’inscription dans un parcours de soins hospitalier ne constitue pas un prérequis. Mais, pour celles qui l’abordent comme une étape de leur transition de genre, l’accès à des professionnels de santé spécialisés et la proximité d’une équipe pluridisciplinaire sont la garantie d’une prise en charge globale et d’un environnement de confiance.
Au début, quand on reçoit ces femmes en consultation, elles se cachent. Derrière une frange, en baissant la tête… Après l’opération, elles ne sont plus les mêmes. Cela ne vient pas tant de la modification de leurs traits que de l’épanouissement qui se lit sur leur visage. » Dr Tristan Beaufils, chirurgien plastique
Parce que le visage est le médium de tout premier contact visuel, les femmes trans recourent d’avantage aux chirurgies de féminisation du visage qu’à celles des organes génitaux. Opérées à des fins thérapeutiques, le corps médical les conseille et réalise des projections visuelles post-opératoires de façon à obtenir le résultat le plus naturel possible.
C’est ainsi que le 11 janvier, le Dr Tristan Beaufils, le Pr Eric Watier et le Pr Nicolas Bertheuil du service de chirurgie plastique du CHU de Rennes ont réalisé aux côtés du Dr Quentin Qassemyar (hôpital Tenon, Paris), chirurgien du visage de notoriété internationale, une féminisation complète du visage chez une jeune-femme de 21 ans – fronto-orbitoplastie, rhinoplastie, génioplastie (menton), bichectomie (boules de Bichat, joues) et V-line (lignes du visage en V) – complétée par la pose de prothèses mammaires pour féminiser son thorax. A l’issue d’une telle opération dont la durée oscille entre six et sept heures, les complications sont infimes et la cicatrisation rapide. En outre, la patiente est gardée en observation deux nuits puis revue régulièrement.
Depuis l’ouverture des consultations pour vaginoplastie en novembre 2020, le Dr Lucas Freton et son équipe ont réalisé près d’une trentaine d’opérations, avec des délais d’attente qui se sont allongés à environ 18 mois pour une consultation et deux ans et demi pour une opération. Le service prévoit également, au cours des prochaines années et en collaboration avec le service de chirurgie plastique, de développer cette activité en débutant les chirurgies masculinisantes, à savoir des métaïdioplasties2 et des phalloplasties. Du côté de la chirurgie plastique, le service a d’ores et déjà effectué en moins d’un an près d’une vingtaine de torsoplasties/mammectomies pour la masculinisation du torse.