Innovation

Une première pour le CHU : un cœur qui bat, hors de tout corps

De battre le cœur a continué.
Le 26 mars 2021, les équipes de chirurgie cardiaque et d’anesthésie-réanimation du CHU de Rennes ont réalisé une transplantation cardiaque d’un genre nouveau grâce à la technologie Organ Care System. Troisième établissement français à disposer de cette technologie et première pour le CHU, cette opération consiste à maintenir l’organe « en vie » en recréant les conditions physiologiques grâce à des perfusions de sang oxygéné. Le cœur est ainsi sécurisé et maintenu fonctionnel pendant toute la durée du trajet jusqu’au receveur.

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Baboum, baboum. Un cœur qui bat… dans une boîte !

Imaginée aux Etats-Unis puis mise en œuvre dans des pays comme l’Australie et l’Angleterre, cette technique de transplantation cardiaque a fait son entrée en France il y a tout juste un an. Elle est une alternative à la technique habituelle consistant à conserver le cœur en arrêt dans la glace. Là, le cœur encore battant est prélevé sur une personne en état de mort cérébrale avant d’être déposé dans la machine Organ Care System où il va être perfusé en sang oxygéné.

On passe littéralement de l’âge de glace a un autre paradigme ! Pr Erwan Flécher, chirurgien cardiaque

Une prouesse technique et d’équipe

Formée par des spécialistes américains à l’hôpital de Marie Lannelongue (92) qui fut le deuxième établissement français à réaliser une telle opération (après Lille), l’équipe du CHU de Rennes* a donc eu rendez-vous un soir de mars avec un passager on ne peut plus singulier. Une fois le greffon prélevé et perfusé dans cette machine à peine plus grosse qu’une glacière, l’équipe a pris l’avion puis la voiture avec à son bord le cœur palpitant. Tout au long du trajet, l’organe a pu être analysé et « boosté » en agissant sur la qualité du sang en circulation. L’opération est un succès et aura duré en tout et pour tout 6 heures, du prélèvement à la transplantation. L’allongement du temps de conservation est un autre atout de cette technique puisque l’on passe d’un délai de 4 heures lorsque que le cœur est dans la glace à un délai dépassant les 6 heures dans le cas présent.

Une innovation peut en cacher une autre

Grâce à cette technique, certains pays comme l’Angleterre parviennent désormais à réanimer des cœurs pourtant prélevés arrêtés chez un donneur. Ainsi, le pays a pu augmenter le nombre de transplantations réalisées chaque année. Mais quel que soit l’état du cœur prélevé, une telle intervention a un coût : plus de 30 000 € par opération, auxquels s’ajoutent les frais de déplacement de l’équipe de prélèvement, le tout financé en France par le CHU où est réalisée la transplantation.

 

Appliquée au cœur, au foie ou encore aux poumons, cette approche fait entrer la greffe dans une nouvelle ère, sans jamais remettre en cause l’efficacité des techniques plus « traditionnelles » de conservation par le froid. Pour le Pr Flécher, à la tête de l’équipe à l’origine de ce succès, l’heure est encore à l’observation et à la temporisation compte tenu du caractère encore récent du dispositif, de son coût et du petit nombre de professionnels formés à cette technique.  

 

*Alessandro Paradiso, perfusioniste ; les docteurs Nicolas Nesseler et Grégoire Le Gac, anesthésistes réanimateurs ; et les docteurs Marie Aymami, Karl Bou Nader, Erwan Flécher et Jean Philippe Verhoye, chirurgiens.